Quelle merveilleuse occasion de se souvenir et de réfléchir… merci CKC pour cela. Voici l’histoire d’une jeune fille d’une région rurale de la Nouvelle-Écosse, qui a grandi sur les rives du lac Thomas, nageant tout l’été et patinant tout l’hiver ; mes trois frères et sœurs et moi étions actifs et en plein air, car rester à la maison n’était pas une option. Première leçon de vie… les autres peuvent et décideront de la façon dont vous occupez votre temps.
Le Cheema Aquatic Club venait d’ouvrir ses portes à Waverley, à quelques minutes en voiture, et mes parents nous y ont emmenés tous les quatre pour découvrir ce que c’était. C’était en 1969, j’avais 11 ans. Nous sommes sortis d’un ancien hangar à avions avec des bateaux et des pagaies donnés par d’autres clubs de la région. Deuxième leçon de vie : partager ses connaissances et ses biens avec les autres, suivi de près par « profiter au maximum de ce que l’on a ». Le travail acharné, le dévouement et la passion ont permis à ce jeune homme de parcourir le monde, de rivaliser avec les meilleurs et de tirer des bénéfices tout au long de sa vie – dont je profite encore aujourd’hui.
La première leçon dont je me souviens vraiment concernant ce sport était de rester au centre du bateau, sinon il y aurait plus de nage que de pagaie… une leçon de vie : chacun a ses conséquences.
Nous avons eu la chance d’avoir un entraîneur-chef et un modèle remarquable à Cheema. Frank Garner était notre mentor ; quelqu’un qui avait connu le succès dans ce sport « nouveau pour nous » qu’était le canoë-kayak (ou canotage comme on l’appelait à l’époque), mais aussi sur le terrain de football de l’Université St. Mary’s.

À mesure qu’il gagnait en expérience en tant qu’entraîneur, nous nous sommes tous améliorés, et Frank aussi. En huit ans, il a entraîné les jeunes du coin jusqu’à leur obtention d’un fanion national. Encore aujourd’hui, cet exploit est époustouflant à bien des égards. Lui et moi avons progressé en équipe – Jeux du Canada, Championnats du monde juniors, Championnats du monde et Jeux olympiques de Montréal de 1976. C’est ainsi qu’a débuté une relation d’entraîneur/athlète, qui a évolué au fil des ans vers un rôle de mentor/mentoré, puis vers un rôle de conseiller/ami de confiance. Frank a donné l’exemple ; il s’attendait à ce que nous soyons ponctuels, que nous travaillions dur, que nous soyons respectueux des autres et que nous prenions le contrôle de ce que nous pouvions contrôler. Quand je pense aux nombreuses leçons de vie que j’ai apprises grâce à ma pratique sportive, ce sont aussi celles que nos parents nous ont enseignées ou nous ont données en exemple : discipline, travail acharné, équité, responsabilité des conséquences de nos actes, engagement, sacrifice et dévouement. Nos parents, nos professeurs, les autres entraîneurs et Frank exigeaient de l’effort et de l’engagement ; la norme en la matière a été établie très tôt. On ne se retirait pas sous prétexte que les choses devenaient difficiles ; nous étions résilients, c’est certain. Les leçons de vie ont été apprises : on récolte ce que l’on sème.
Bien que les questions de genre existent depuis l’aube de la participation des femmes au sport, je n’en étais pas consciente à Cheema, du moins pas lorsque Frank y participait. Frank a apporté son approche inclusive et tolérante à son entraînement. Il n’en attendait pas moins de nous, les femmes, peut-être parce que nous étions un groupe à avoir excellé très tôt… en C15 et en C-4. Nous nous entraînions toutes ensemble dans de petites embarcations, et le programme était identique pour les femmes et les hommes. Mais il était clair que le canoë comportait des préjugés sexistes, car aux Jeux olympiques de 1976, il y avait deux courses pour les femmes et neuf pour les hommes. Leçon de vie : la vie n’est pas toujours juste.
Mon analyse des enjeux liés au genre que j’ai vécus m’a menée à ma maîtrise en éthique du sport. Cette expérience m’a ouvert les portes de l’enseignement au programme de kinésiologie de mon alma mater, l’Université Acadia, dans un cours d’éthique ainsi que dans un cours d’entraînement.
Beaucoup des leçons apprises grâce au sport se sont répercutées dans ma vie professionnelle. J’ai enseigné pendant 30 ans à l’Université Acadia, à Wolfville, en Nouvelle-Écosse. Mon travail a été influencé par le travail acharné appris sur l’eau, la morale et la volonté de faire ce qui est juste, ainsi que par la conviction fondamentale que si le sport est pratiqué de manière à ce que tous, enfants et adultes, puissent s’amuser et bénéficier des multiples bienfaits qu’il apporte à nos vies, alors c’est la plus grande victoire que l’on puisse espérer. Leçon de vie : gagner ne signifie pas toujours arriver en premier.

Je serai éternellement reconnaissante pour tout ce que le sport a apporté à ma vie, et je ne saurais exprimer tout ce que Frank a fait pour moi, ce que mes parents et ma famille ont fait, mes amis proches, ma communauté de Fall River/Waverley, et ce que le Cheema Aquatic Club a apporté, non seulement à moi, mais à tant de jeunes. Merci à mon sport, le canoë-kayak, pour ces formidables occasions d’apprentissage. Qui aurait cru, le premier jour où je me suis assise dans un kayak, il y a 56 ans, que je réfléchirais aujourd’hui à tout ce que vous avez apporté à ma vie ? Et à ceux qui lisent ces lignes et qui entraînent de jeunes enfants, réfléchissez à ce que vous attendez de ces participants de leur expérience en canoë-kayak. Voyager, remporter des médailles et gagner sont des choses formidables, mais pour beaucoup, ce ne sont pas les résultats qu’ils obtiendront. D’autres en tireront d’autres bénéfices. Sous votre direction, ils auront la chance d’être actifs, de se faire de nouveaux amis, de découvrir potentiellement leur passion et de pratiquer un sport qu’ils pourront pratiquer toute leur vie. Eux aussi apprendront de nombreuses leçons de vie grâce au sport… J’espère simplement que ce seront des leçons positives sur lesquelles ils réfléchiront des années plus tard.
Par écrit et soumis par Ann Dodge, MPE